Alors que Donald Trump fait de la relocalisation industrielle quasiment une obsession, l’entreprise Purism révèle les écueils de cette ambition avec son Liberty Phone, qui se rapproche le plus d’un smartphone fabriqué aux États-Unis à l’heure actuelle.
Avant toute chose, levons un mythe : aucun smartphone n’est actuellement conçu à 100% aux États-Unis, et selon les experts, cela ne sera pas possible avant de nombreuses années et une grosse expertise, malgré les ambitions de Donald Trump.
C’est pourquoi l’annonce du « Trump Mobile T1 Phone » à 499 dollars, présenté comme « conçu et construit aux États-Unis » par la Trump Organization pour septembre prochain, a suscité le scepticisme des observateurs le mois dernier.
« Il est supposément fabriqué aux États-Unis, bon marché, et arrive cet automne. Je doute de tout cela », écrivait le journaliste David Pierce sur The Verge. Quelques jours plus tard, la Trump Organization nuançait déjà son discours, évoquant un smartphone conçu avec « des valeurs américaines à l’esprit », « des mains américaines derrière chaque appareil » plutôt que « fabriqué entièrement aux États-Unis ».
Ce glissement sémantique illustre la difficulté, voire l’impossibilité, de proposer un téléphone 100% américain aujourd’hui. Le Liberty Phone de Purism, vendu 1 999 dollars, en est le parfait exemple.
Dix ans de travail pour un résultat modeste
Todd Weaver, fondateur de l’entreprise, dit avoir consacré une décennie à développer ce qui constitue probablement la tentative la plus aboutie d’un smartphone américain. Pourtant, le résultat force l’humilité, comme le décrit le Wall Street Journal (WSJ).
C’est-à-dire un appareil aux spécifications qui auraient été impressionnantes il y a dix ans, vendu quatre fois le prix d’un iPhone équivalent. L’analyse des composants lève le voile sur les limites actuelles de l’industrie manufacturière américaine.
Si la carte-mère est effectivement assemblée dans les locaux de Purism en Californie, et que le processeur provient du Texas via la firme néerlandaise NXP, de nombreux éléments essentiels restent importés. L’écran et la batterie arrivent de Chine, l’appareil photo de Corée du Sud.
Avec un coût de production estimé à 650 dollars contre 550 dollars pour un iPhone 16 Pro Max fabriqué en Chine, le Liberty Phone démontre que les salaires américains plus élevés ne peuvent être compensés que partiellement par des composants moins coûteux et de moindre qualité.
Un marché de niche face aux géants technologiques
Car le Liberty Phone ne fonctionne ni sous Android ni sous iOS, mais avec PureOS, un système d’exploitation propriétaire limité aux appels, SMS, navigation web et quelques applications basiques.
Selon Todd Weaver, la moitié des ventes du téléphone s’effectue auprès d’agences gouvernementales américaines, l’autre moitié étant constituée de « geeks de la sécurité », de parents cherchant un téléphone pour leurs enfants, de personnes âgées ou d’utilisateurs souhaitant éviter les géants technologiques.
Un positionnement assumé qui reconnaît l’impossibilité de concurrencer frontalement les mastodontes du secteur. La preuve, Purism ne peut en produire que 10 000 unités par mois, contre les 225 millions d’iPhone écoulés par Apple en 2024.