Cette pratique, autrefois spontanée, est devenue une obligation tacite au Canada, créant une pression croissante sur les clients.

Partout ailleurs, le pourboire ou « tip » (en anglais) est avant tout une libéralité, un geste de satisfaction en réaction à un service. Au Canada en revanche, cela relève d’une norme sociale acceptée par les clients – même si rien ne les y contraint vraiment – pour des raisons propres au pays.

Les serveurs de restaurant ou de bar, les livreurs, les chauffeurs de taxi, les bagagistes, les guides touristiques et les coiffeurs exercent en effet des métiers dits « à pourboire », et généralement moins rémunéré que les autres professions. Le pourboire leur permet ainsi de compenser l’écart.

Pour avoir une idée de cette disparité salariale : les serveurs touchent 12,90 dollars canadiens (8,27 euros) de salaire minimum horaire brut, contre 16,10 dollars (10,32 euros) pour les autres, selon Le Monde.

« On m’a expliqué qu’ici, les serveurs ont vraiment besoin de cet argent« , explique au quotidien du soir, Isabelle Durand, 67 ans, retraitée de la région orléanaise en visite au Québec. Comme beaucoup de Français découvrant ce système, elle avoue avoir été surprise.

Différentes options de tips

Il existe également différentes grilles de pourboires, allant de 15 à 20 % du coût du service, selon le secteur concerné.

Cela peut générer des revenus substantiels. « Je peux empocher de très bons pourboires l’été. Il m’arrive de repartir chez moi avec 250 dollars canadiens (160 euros) par jour », révèle Marie Rigaud, serveuse depuis trois ans dans un restaurant de sushis à Montréal après avoir exercé en France, dans Le Monde.

Elle avoue toutefois sa gêne vis-à-vis des clients : « Tu as souvent l’impression de quémander. Ça met les clients dans une position de pouvoir« . Parallèlement, une véritable « épidémie de sollicitation » semble s’être développée, mettant les clients dans l’embarras.

Dans les aéroports, les boutiques de vêtements, les cafés rapides, les terminaux de paiement proposent désormais systématiquement des options de pourboire.

Mathieu Nadeau, étudiant de retour d’un voyage en France, s’étonne : « À la boutique de l’aéroport, j’achète une bouteille et on me propose d’ajouter 15 % sur la machine. Avant, on ne voyait pas ça. Où est la limite ? »

Un malaise généralisé

Cette expansion tous azimuts du pourboire révèle une dérive inquiétante. Les entreprises ont compris qu’elles pouvaient transférer une partie de leurs coûts salariaux directement sur les consommateurs, sans transparence ni négociation. D’autant que l’inflation fait grimper la facture du consommateur.

« Vous vous retrouvez parfois avec des choix qui commencent à 18 % et qui montent à 25 %« , indique Wayne Smith, directeur de l’Institute for Hospitality and Tourism Research à Toronto.

De fait, 67 % des Canadiens avouent ressentir une pression accrue au moment de se plier à cette tradition, d’après un sondage de la firme Lightspeed mené en mai 2024. « Je pense que le pourboire a perdu son sens en 2025 », estime Étienne Nadeau, responsable d’un restaurant.

Près de 60 % des consommateurs souhaiteraient abandonner le pourboire dans les restaurants et passer à un modèle où tout est inclus dans le prix, selon un sondage Angus Reid de 2024.

LAISSER UN COMMENTAIRE

Please enter your comment!
Please enter your name here

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.